
« Le corps, par les seules lois de sa nature, peut beaucoup de choses dont son esprit reste étonné. En outre, personne ne sait de quelle manière ou par quels moyens l’esprit meut le corps, ni combien de degrés de mouvement il peut lui imprimer, ni avec quelle vitesse il peut le mouvoir. D’où suit que les hommes, quand ils disent que telle ou telle action du corps vient de l’esprit qui a un empire sur le corps, ne savent pas ce qu’ils disent et ne font rien d’autre qu’avouer en un langage spécieux qu’ils ignorent la vraie cause d’une action et ne s’en étonnent pas. »
Spinoza, XVII° siècle
Les contes nous promettent la résilience
Toutes les histoires et hypothèses relatives à la vie anténatale pourraient expliquer la résilience. rebondissement en anglais. Cette notion empruntée aux sciences physiques évoque l’état du petit avion dont les ailes se tordent en traversant la tempête et qui arrivant au sol a retrouvé ses formes originelles. Elle a été reprise en psychologie, psychanalyse et psychiatrie, notamment par B. Cyrulnik, pour évoquer cette capacité naturelle conduisant certaines personnes à être heureuses malgré une petite-enfance atroce, malgré des traumatismes officiellement attendus comme générateurs de graves troubles de la joie et du bonheur.
Dans les contes de Russie et de partout, parmi les frères ou les sœurs, l’une ou l’un est souvent doué de toutes les qualités et en particulier de celle du bonheur, alors même que sa mère est morte en couche, qu’elle l’a délaissé.e ou qu’il ou elle a été maltraité.e. Selon notre compréhension habituelle du monde, il ou elle aurait dû être le ou la plus malheureux.se et le ou la moins doué.e des sœurs ou frères…
Petite pause de méthode : nous sommes condamnés aux hypothèses
D’expérience, nous savons que notre corps sait guérir nos inconforts physiques ou physiologiques. Il guérit la fatigue par le sommeil, la faim par l’alimentation et la digestion, le besoin d’oxygène par la respiration, les bobos de toutes sortes, les infections, etc. Quand nous avons une plaie, une croûte se fait, puis tombe. C’est fini. C’est naturel. Tout se passe au niveau corporel, et d’autant mieux que nous laissons notre mental de côté, hors-jeu : si nous nous mettons à vouloir vérifier la cicatrisation en grattant la croûte, à vouloir marcher dès le lendemain de la chute, à vouloir digérer, ou à vouloir dormir, les choses se compliquent. Autrement dit, face à toutes ces difficultés qu’il résout, notre corps est résilient, à condition qu’on le laisse faire.
De même, l’expérience nous le montre, notre corps sait aussi guérir nos inconforts émotionnels, les faire disparaître vraiment. Il suffit de le laisser faire. Ce n’est pas une hypothèse, c’est vrai : vous pouvez déjà le vérifier expérimentalement si vous faites l’effort mental de vous rappeler des situations dont vous savez encore qu’elles vous ont fait souffrir à une époque mais que vous regardez aujourd’hui vraiment sans douleur ou même avec un sourire bienveillant ou attendri. C’est aussi ce que vous allez expérimenter intentionnellement après avoir lu les livres à ce sujet. Vous allez vérifier que vous pouvez aider votre collègue à se libérer vraiment de sa peur de parler en public ou de prendre l’avion, ou vous-même de votre procrastination à remplir vos papiers administratifs, pour prendre deux exemples parmi des milliers d’autres.
Et, comme pour la plupart de nos faims, soifs, fatigues, bobos, douleurs oubliés sans même avoir laissé une cicatrice, notre corps ne garde pas traces des chocs émotionnels, affectifs, psychologiques qu’il a rencontrés. Nous en perdons souvent aussi la mémoire. Car celle-ci est également devenue inutile. Comme pour la croûte qui tombe après cicatrisation, le dossier est classé, le contrat d’abonnement résilié.
Mais à l’époque prénatale et périnatale, nous nous développions à une allure incroyable. En extrapolant les hypothèses collectées ici et là, notre mental ne peut s’empêcher de faire des suppositions. Avons-nous été plus maltraités que d’autres ? Mais alors pourquoi la nature ou Dieu ne nous ont-ils pas doté d’une résilience immédiate et absolue ? Avons-nous été submergés de chocs physiques du fait de notre développement ? Mais alors comment et pourquoi avons-nous survécu ? Avons-nous été perturbés par le développement de notre cerveau, la concomitance d’un cerveau reptilien et d’un cerveau limbique ? Mais pourquoi la nature ou Dieu auraient-ils organisé les choses ainsi ?
La seule certitude vérifiable est que nous n’avons pas encore tout compris, parce que nous n’avons pas les moyens de tout expérimenter. La bonne nouvelle c’est que voilà une invitation supplémentaire à débrancher notre mental qui ne nous est pour le moment d’aucun secours. Autre certitude : notre mental existe et a besoin d’explication pour se tenir tranquille. Si nous allons dans le sens qui nous semble être celui à la fois des mythes et des recherches scientifiques, nous pouvons oser une hypothèse.
Ce n’est qu’une hypothèse, c’est-à-dire une idée qui devra être testée et confirmée ou infirmée et qui pourra à tout moment être remise en cause par de nouvelles propositions.
L’hypothèse à tiroirs actuelle
L’hypothèse qui se dégage en l’état actuel des connaissances pourrait être la suivante. Nous savons que nous avons vécu des chocs, que beaucoup n’en ont pas réchappé, et que certains d’entre nous vivent très bien et même très vieux.
Tout se passe donc comme si, secoués par les chocs liés à notre besoin vital de nous adapter au monde pour au moins survivre, nous avons été submergés à certains moments par certains de ces chocs, trop nombreux ou trop forts, ou trop surprenants, ou pour toute autre raison que nous ne sommes pas en mesure d’élucider.
Nous n’avons pas tout géré sur le moment et nous avons stocké certains effets de certains chocs, qui se sont enkystés et qui reviennent comme des échos dans certaines situations.
Ceci n’est qu’une hypothèse extrapolée des recherches actuelles sur le stress post-traumatique et qui se trouve être assez largement présente quoique de manière dissimulée dans les grands mythes et les contes. Elle nous arrange bien. C’est pourquoi nous allons la suivre pour à la fois tranquilliser notre mental et retrouver l’accès à notre résilience innée si bénéfique.
Une procédure de résilience : nous sommes tous résilients
Mise en forme par de nombreux thérapeutes tout au long des siècles, la procédure de mobilisation de notre résilience se différencie de toute technique qui chercherait à corriger ou à induire des postures ou des fonctionnements. Cette procédure conduit dans le corps et le laisse faire. Elle rend la main à notre capacité innée de guérison, à notre pulsion de vie naturelle. Elle est simple, confortable et rapide précisément parce qu’il n’y a rien à faire d’autre que de laisser notre nature corporelle mobiliser ses compétences innées : dénouer et oublier corporellement les effets des traumatismes anciens. C’est pourquoi moins la procédure est agrémentée d’ingrédients liés à la sphère du mental et des affects, plus son déroulement est rapide et plus sûrs sont ses effets.
La guérison n’est pas une mise à distance plus ou moins durable comme nous avons l’habitude de prendre soin de nos inconforts, de les gérer.
C’est une libération définitive de fonctionnements devenus inutiles et inconfortables. L’unité de l’être corps-cœur-esprit préside à l’imbrication et à l’impact réciproque de la santé physique et de la santé mentale. Elle établit la fluidité entre les fonctions mentales, c’est-à-dire les fonctions cognitives qui permettent de penser la réalité et les fonctions émotionnelles qui président à nos échanges avec le monde ; mais aussi les fonctions physiques et physiologiques. Par suite, cette unité agit sur les fonctions et les relations sociales.
La procédure améliore la santé émotionnelle, comportementale et symptomatique qui sont ses points d’accroche. Par synergie, elle favorise des évolutions positives et souvent incroyables dans tous les domaines de notre vie qui se libère de nos camisoles et cuirasses émotionnelles. En résiliant les traces traumatiques de notre passé, nous cheminons vers notre nature première, celle d’être libre, bonne/bon et belle/beau.
Quitter la galaxie du mental et de l’émotionnel pour se rendre dans la galaxie du corps équivaut à ouvrir l’accès à notre résilience.
La procédure proposée ici permet de mobiliser volontairement nos capacités physiques/mécaniques/corporelles à nous remettre d’une contrainte ou d’un choc, le plus souvent inconscient. Elle donne accès à notre résilience, dans notre corps. Pour ce faire, elle évite de solliciter la compréhension ou l’analyse. Elle permet ainsi de continuer de vivre plutôt que d’aménager des modes de survie. Autrement dit, elle conduit à recouvrer la santé.
En résiliant les traces du passé traumatique, l’utilisation intentionnelle de la procédure mobilise notre capacité de rebondissement, notre résilience. Les effets de cette dernière permettront de mieux traverser les difficultés à venir.
La procédure permet de se libérer d’inconforts d’ordre émotionnel qui peuvent paraître irrationnels, comme on résilie un abonnement devenu caduque. Après l’avoir utilisée, les émotions ne reviennent pas. Elle a donné accès à notre capacité innée de guérison. Elle a rendu la main à notre pulsion de vie. (cf les théories premières de Freud et de Reich présentées notamment dans le livre S’écouter pour écouter, Sésame une méthode à l’écoute du non verbal).
L’acte de résiliation passe par la capacité de résilience et aboutit au constat d’une guérison qui semble reçue, donnée. Au niveau de notre corps, la capacité et l’acte se confondent pour rendre des degrés de vie-vraie. Par la résiliation de nos abonnements aux émotions qui nous ligotent, nous désempilons/désimbriquons les couches de ce nous appelons nos traumatismes passés. De la sorte nous retrouvons la capacité d’assumer les prochains à-coups que la réalité va inévitablement nous servir : nous sommes résilients. La vie reprend d’elle-même son déploiement.
C’est pourquoi les grandes traditions présentent des dieux qui s’incarnent, ou des “demis dieu”, ou des représentants ou prophètes parmi les humains, des dieux dont notre humanité est l’image. Dans la Bible par exemple, les textes disent aux hommes qu’ils sont d’essence divine, faits pour Vivre, libres et joyeux, pour déployer leur créativité qui sera créatrice, dès aujourd’hui. Ils parlent de re-susciter la vie immédiatement, par l’exercice a priori contre nature et fort décevant consistant à lâcher prise comme on dit et laisser faire.
Une explication de la résilience
Ici se présente une procédure, Sésame. Elle sert à résilier volontairement les inconforts d’ordre émotionnels : les émotions désagréables, les comportements inadaptés, les symptômes gênants.
Si, quand je suis en situation d’inconfort d’ordre émotionnel, je mets en œuvre Sésame :
- En me mettant à observer ce qui se passe dans mon corps, je prends acte de ma réalité vivante, c’est-à-dire que je suis recentré.e sur le présent en train d’advenir. Cela apaise immédiatement mon ébullition émotionnelle, car il n’y a plus d’écran entre la réalité et moi (im-médiat = sans intermédiaire). Et l’imagerie cérébrale confirme par la géographie du cerveau l’impossibilité physique d’être à la fois dans l’émotion et dans ce qui se passe dans le corps.
- En fermant les yeux, je m’immerge dans ma réalité présente. Je ne la vois plus comme dans le focus d’une caméra. Je ne suis plus en mesure de la juger puisque je suis dedans. Ainsi, mon mental est mis hors-jeu. Paradoxalement, cela me donne l’impression d’une prise de recul par rapport à mon habitude de gestionnaire affairé.
- En identifiant les sensations physiques, en les localisant dans mon corps ici et maintenant, je m’immerge et m’ancre dans ma réalité corporelle, c’est-à-dire dans mon existence du moment. Comme le sous-marin ne peut pas être à la fois dans l’eau et hors de l’eau, je ne peux pas être à la fois dans mon corps ici et maintenant et dans mon mental. Pas question d’analyse ou de contrôle, seulement de l’expérience, du constat : le mental est débranché.
- En laissant évoluer mes sensations sans agir sur leur processus d’évolution, en les laissant se transformer d’elles-mêmes, je renonce à la toute puissance mortifère de mon mental : mortifère parce que mensongère, si j’étais toute puissante je ne serai pas mortelle. Et je passe la main à mon corps et ses capacités naturelles de faire au mieux au présent dans le sens de la vie. Autrement dit, je retrouve ma résilience.
Alors, mon corps par son processus inné de résilience :
- expérimente que les sensations originaires, qui m’avaient signifié un risque de mort imminente, et qui avaient déclenché en moi un système d’alarme amélioré d’un système de gestion, ne sont plus signifiantes du même risque aujourd’hui ;
- par conséquent débranche l’alarme qu’il avait installée sur le faisceau de sensations qui étaient apparues au moment du danger mortel ;
- désactive ainsi l’émotion mise en place autrefois pour gérer le caractère terrorisant des sensations potentiellement dangereuses, et l’interprétation mensongère de la réalité élaborée à partir de cette émotion ;
-
- se débarrasse physiquement de la trace de cette alarme, comme il le fait pour tout ce qui ne lui est pas utile (il n’y a plus trace de l’émotion, dans ce que nous appelons la tête mais qui est bien corporel – notre cerveau, nos neurones, donc notre mémoire).
Autrement dit Sésame, procédure de résiliation émotionnelle, permet au corps de constater l’inutilité actuelle de son abonnement à l’émotion et donc de résilier cet abonnement.
Ainsi je retrouve un peu plus ma forme et mes capacités originelles, mon incarnation bénie (belle, bonne, heureuse). La résiliation se différencie de la résilience comme la digestion se différencie de la métabolisation, la respiration de l’oxygénation, ou la formation de la croûte de la cicatrisation.
La résilience est donnée
Associée au verbe actif résilier, la résiliation émotionnelle est un acte comme la digestion, la respiration ou la cicatrisation. Cet acte de résiliation peut résulter d’une décision involontaire et inconsciente comme cela semble être le cas chez les personnes dites résilientes, et certainement dans de nombreux cas pour les autres.
La bonne nouvelle réside dans le constat que cet acte peut aussi résulter d’une décision consciente et volontaire.
Mieux encore, cet acte de résiliation émotionnelle peut m’être sensoriellement proposé par une autre personne qui désire pour moi du « vivre plus ».
Encore mieux : puisqu’elle peut être mobilisée de manière inconsciente et involontaire, la résiliation émotionnelle est une capacité universelle au même titre que la digestion, la respiration ou la cicatrisation. Elle est donc accessible à tous, petits ou chauves, maigres ou jeunes, blonds ou grands, quels que soient leur état de santé physiologique, physique, cognitive, psychique, mentale, spirituelle.
La promesse de la résiliation émotionnelle passe aussi par cette résiliation de toute étiquette, de toute catégorisation des humains. Elle procède ainsi à l’unité de l’humanité, et par suite à plus d’humanité. C’est ce que nous montre l’expérience.
C’est pourquoi nous vous proposons d’apprendre à aider les autres à mobiliser leur résilience quand un inconfort les prend.